Évolution jurisprudentielle sur les avantages catégories conventionnels (ex. cadres/non cadres)

Partager cette page

Dans une série d’arrêts du 27 janvier 2015, la Cour de cassation modifie en profondeur sa position sur la légalité des avantages catégoriels au regard du principe de l’égalité de traitement en leur accordant une présomption de justification dès lors qu’ils résultent de conventions ou d’accords collectifs. En revanche, elle refuse d’appliquer cette solution aux avantages résultant d’une décision unilatérale de l’employeur.

Ce faisant, la Cour de cassation met fin à un paradoxe. En effet, alors même que le législateur permet aux partenaires sociaux de définir certaines normes en droit du travail par accords collectifs, la jurisprudence reconnaissait au juge la faculté de dire ce que les organisations patronales et syndicales avaient ou non le droit de négocier. Elle pouvait donc, ainsi, remettre en cause des stipulations conventionnelles sur le seul constat d’une différence de traitement entre salariés relevant de catégories professionnelles différentes. La Cour de cassation modifie en profondeur sa jurisprudence antérieure.

Les 3 arrêts du 27 janvier 2015, qui instituent une présomption de justification, marquent l’achèvement d’une évolution progressive de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation en matière d’avantages catégoriels inaugurée par l’arrêt Pain I du 1er juillet 2009. La Haute Juridiction avait alors jugé, à propos de jours de congés payés supplémentaires accordés aux seuls cadres par un accord collectif, que la différence de catégorie professionnelle ne suffisait pas à justifier, pour l’attribution d’un avantage, une différence de traitement entre des salariés placés dans une situation identique au regard dudit avantage, cette différence devant reposer sur des raisons objectives et pertinentes.

Mais cette solution avait essuyé de nombreuses critiques car, de fait, elle remettait en cause nombre de dispositions conventionnelles. Aussi, la Cour de cassation avait assoupli sa position en 2011 en précisant que les différences de traitement catégorielles étaient justifiées si elles avaient pour but de prendre en compte les spécificités de la situation des salariés d’une catégorie déterminée, tenant notamment aux conditions d’exercice de leurs fonctions, à l’évolution de leur carrière ou aux modalités de leur rémunération

En 2013, la Cour de cassation a même écarté l’application de ces principes en matière de protection sociale complémentaire et jugé que, compte tenu des particularités des régimes de prévoyance, l’égalité de traitement ne s’appliquait qu’entre les salariés relevant d’une même catégorie professionnelle.

Avec l’instauration d’une présomption de justification des avantages catégoriels conventionnels, la Haute Juridiction inverse la charge de la preuve, revenant ainsi aux règles de droit commun en la matière. C’est donc désormais à celui qui conteste les avantages catégoriels (salarié ou organisation syndicale) de démontrer que les différences de traitement entre catégories professionnelles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle.

Force est de constater, toutefois, que l’application de cette présomption est limitée aux avantages catégoriels de nature professionnelle. Sont ainsi présumées justifiées, notamment, toutes les différences de traitement entre cadres et non cadres en matière de calcul de l’indemnité de licenciement, de durée de préavis ou de primes d’ancienneté, etc.

En revanche, il pourrait en aller différemment pour les avantages suivants qui ne semblent pas motivés par des considérations de nature professionnelle : prime de mariage, jours d’absence autorisés pour s’occuper d’un enfant malade, etc.

Cass. soc. 27 janvier 2015 n° 13-22.179

Cass. soc. 27 janvier 2015 n° 13-25.437

Cass. soc. 27 janvier 2015 n° 13-14.773

Cass. soc. 27 janvier 2015 n° 13-17.622