La question fondamentale de l’accessibilité face au handicap peine à prendre la place qu’elle mérite. Les lois censées garantir l’accompagnement des publics concernés tout au long de la vie ne sont pas appliquées ou le sont mal. La première bataille est donc l’application effective de ces droits, notamment dans les domaines de l’éducation (primaire, secondaire, supérieur) et de l’emploi.

Ainsi, la bataille commence dès la formation : l’accès à tous les métiers suppose que toutes les filières soient réellement accessibles. Combien d’étudiant·es en situation de handicap voient leurs études interrompues faute de matériel adapté ou d’aménagement d’examen ? Combien de jeunes diplômé·es n’obtiennent pas le stage qui leur permettrait de débuter dans leur métier, simplement parce que l’entreprise n’a pas prévu d’aménagement ?

Le Code du travail interdit la discrimination liée au handicap mais, dans la pratique, des postes restent inaccessibles. Des salarié·es sont obligé·es de refuser des missions ou de se contenter d’emplois subalternes faute de bureaux adaptés, de logiciels accessibles ou de possibilités de télétravail aménagées.

Publics pénalisés : des chiffres parlants

En France, le taux de chômage s’élève à 12 % pour les personnes reconnues handicapées, contre 7 % pour les personnes non handicapées. Le taux d’activité (emploi + chômage) est de 45 % pour les personnes handicapées (74 % pour les autres). La répartition par catégorie professionnelle montre que 11 % des personnes handicapées sont cadres – chez les autres, le taux est de 22 %. À l’inverse, 60 % des personnes handicapées sont ouvriers·ères et employé·es, contre 44 % des autres.

À cela s’ajoute une réalité massive mais méconnue : 80 % des handicaps sont invisibles. Ainsi, beaucoup de salarié·es n’osent pas se déclarer handicapé·es. Les démarches administratives sont lourdes, les délais de traitement très variables en fonction des départements et, surtout, les bénéfices restent limités : aménagements rares, impact réel faible sur le salaire ou sur la carrière. Pourquoi se signaler quand personne ne prend réellement en compte ses besoins ?

Des situations concrètes à prendre en compte

Il est urgent de repenser nos lieux de travail, nos écoles et nos espaces publics pour qu’ils soient réellement accessibles à toutes et tous. À défaut, l’exclusion perdurera : les exemples sont multiples. Ainsi, une salariée malvoyante doit demander chaque mois à son service informatique de régler les paramètres de son ordinateur pour qu’il reste utilisable. Un étudiant en fauteuil roulant ne peut assister à certains cours, car l’amphithéâtre n’a pas d’ascenseur. Un employé atteint d’une maladie chronique ne peut pas obtenir de télétravail régulier malgré la nécessité médicale, car l’entreprise ne prévoit pas ce type d’aménagement. Ces obstacles, qu’ils soient physiques ou mentaux, ne disparaîtront pas d’eux mêmes. Leur suppression suppose un engagement collectif et constant pour faire de l’accessibilité une priorité réelle et garantir le respect de nos droits.

Sources :

  • Insee, Handicap et emploi (dernières enquêtes sur la situation professionnelle des personnes en situation de handicap).
  • DARES, Les personnes handicapées dans l’emploi, synthèse statistique.
  • Agefiph, rapports annuels sur l’emploi des personnes handicapées.